La Vie Vs Web 2.0 épisode 1 : Seesmic Vs les potes.

Seesmic
Si on ne fait pas gaffe, on peut débuter en caleçon devant son écran à bouffer une pizza.
La vie moderne aidant, les chances de socialiser se font minces, mais on se voit via internet.
On n’hésite pas à se montrer au naturel, affalé sur le sofa, on s’en fout : on est sur Seesmic.
Puis on parle de tout et de rien pendant des heures.
Puis on devient proches.
Puis on se rencontre finalement au restaurant/en boite/au bar.
Wow c’était trop cool cette soirée.

RL
On se rencontre au restaurant/en boite/au bar.
Wow c’était trop cool cette soirée.
On devient proches.
Puis on parle de tout et de rien pendant des heures.
On n’hésite pas à se montrer au naturel, affalé sur le sofa : on s’en fout on est potes.
Puis la vie aidant, les chances de socialiser se font minces, mais on se voit via internet.
Si on ne fait pas gaffe, on peut finir en caleçon devant son écran à bouffer une pizza.

ok, c’est un peu naze, mais il y avait de l’idée.
Je ne publierai pas les commentaires infâmants ou mentionnant Steevie Boulay.

Eia à Césaire, le blanc te salue.

Eia à Césaire, le blanc te salue.

Cahiers d’une Arrivée

Jeudi Dernier, arrivée à Fort de France, [tag]Martinique[/tag]. Aéroport [tag]Aimé Césaire[/tag].
On m’y annonce qu’Aimé [tag]Césaire[/tag] est mort.
Un homme que j’aimais, au sujet duquel j’avais déjà écrit sur ce blog, un « péyi » que j’admire, un week-end intense à envisager, un emploi du temps professionnel annulé pour deuil national. Mais le sentiment, dans cette tristesse ambiante, d’être chanceux de pouvoir être là pour ces jours-là.

Des fleurs de balisiers, symbole du Parti Progressiste Martiniquais que fonda Césaire, partout sur les routes, partout dans les mains, comme des flammes immobiles, des Martiniquais dignes mais attirés comme un aimant par la procession, la voiture, toucher la vitre, dire Adieu, et suivre, klaxonner, chanter, pleurer, réciter, se faire voir ou se cacher, jusqu’au stade Dillon/[tag]Aliker[/tag], où il fait déjà nuit, trois heures de retard, le cercueil se pose, et où l’on vient encore, où l’on ne fait que commencer de venir, le cercueil, toucher la vitre du cercueil.

A [tag]Fort-de-France[/tag] des panneaux en papiers immaculés ont été tirés pour que la rue puisse écrire sa douleur, mais le fond est moins spontané, moins naturel, les phrases se ressemblent, sont moins précises que les regards, on se rend compte que la connaissance de Césaire est disparate, qui de connaitre le chantre de la négritude, qui de louer le symbole, qui de louer l’éternel maire de Fort de France. Quelque soit le degré de connaissance au sujet de Césaire, la douleur semble être la même.

Lire Césaire quand on est blanc

Césaire m’a non seulement fait prendre conscience d’une douleur exprimée, de la part de responsabilité qui résonne en moi, de la part de bourreau mais aussi de victime, mais le terme d’universalité qu’on utilise à tout bout de champ en ce moment pour qualifier son oeuvre est tout à fait juste.

Non seulement l’[tag]Antillais[/tag] n’est pas un africain, puisque coule en lui du sang blanc, noir, caraïbe, mais une lecture de Césaire permet d’élargir cette négritude à tous les opprimés, colonisés, fléchis de la terre.
In extenso, pêle mêle accolés dans les actualités, se télescopaient dans les journaux télévisés des nègres tibétains, des nègres palestiniens, des nègres de toutes les couleurs.
Et si l’œuvre de Césaire est importante, c’est non pour avoir rétabli une vérité, car il n’est de vérité poétique, mais rétabli une fierté.

Dans ce que me disaient les martiniquais je retrouvais souvent ces termes : vertical, droit, fier.
« Un homme vertical ». Pas courbé, pas penché, droit, fier.
Et si identité il y a, c’est encore une identité faible, peu solide, à construire. Identité précaire d’un peuple partagé entre un passé douloureux, un présent assez bancal, et un avenir indéterminé.

Ce passage d’Edouard [tag]Glissant[/tag] dans « Le Discours Antillais » (folio essais, 1997) illustre à mon sens magnifiquement cet entre-deux :

« Aussi bien, si cet espace n’est pas l’espace ancestral, ce n’est pas non plus un espace possédé. La collectivité martiniquaise s’équilibrerait de savoir qu’entre l’idéal perdu du retour à l’Afrique et l’idéal de la promotion à la citoyenneté française, une réelle et dense dimension a été mise entre parenthèses au fil de l’histoire subie, et qui est la possession soufferte de la terre nouvelle.
La légitimité de cette possession collective n’est pas même esquissée. Il n’y a ni possession de la terre, ni complicité avec la terre, ni espoir en la terre. La prodigalité (ou l’apparente insouciance) dont semblaient faire preuve les Martiniquais relève de ce sentiment obscur d’être littéralement de passage sur leur terre. »

Verticaux / Horizontaux

Pendant ces obsèques nationales et verticales, à l’hôtel Carayou des Trois-Ilets (fort agréable et très bon service au demeurant), des métropolitains ayant payé pour le voyage sont en position horizontale, au soleil.

Manger seul au petit déjeuner vous permet d’observer en zoologue certains de ces touristes à la peau rouge et au débardeur échancré s’adresser au personnel Martiniquais comme s’il s’agissait de petits macaques obéissants. Ceux qui sont vraiment à coté de la plaque, ce sont eux. Ces quelques touristes métropolitains. On leur a dit qu’avec le personnel hôtelier des Antilles, fallait pas se laisser faire, faut être sec et cassant tout de suite, après ça passe. Vraiment. Ils feraient mieux d’un peu plus lire Césaire.

Ode au Spam

Ode au Spam


(licence cc-by-nc-sa photo by Steve Longus)

Je ne me suis jamais lassé des spams, et chaque [tag]spam[/tag] que je reçois mérite de ma part une lecture attentionnée, par respect pour les auteurs.
Pour constamment créer l’attrait, les spams changent très souvent d’accroches, de contenus, et même de formes, de champs lexicaux, de typographie. Pour échapper aux systèmes anti-spams, les mots eux-mêmes sont déformés (par exemple, VIAGRA est écrit VIIARGA ou VI*GR*), et les résultats de ces trouvailles sont des œuvres surréalistes et souvent teintées d’humour.
Les spams sont presque toujours rédigés en anglais et je pense souvent aux pauvres gars qui sont censés les écrire, c’est pour moi des types inventifs et drôles.

Etant plus jeune, j’avais souvent manifesté l’envie de faire ce job, mais je n’avais pas vraiment su à qui m’adresser. Rédacteur de spam demande de l’abnégation et de la créativité, comme ces romanciers sans succés qui finissent par écrire des fausses lettres dans Union.

Les spams tournent globalement autour du sexe (élargir son pénis – rencontrer des filles faciles – bien bander et longtemps) et des finances (un super crédit vous est accordé dans que vous n’ayez jamais rien demandé – un diplomate Nigérien aimerait bien mettre à l’abri dans votre compte en banque deux ou trois milliards de dollars s’il vous plait).

Les gens se plaignent énormément des spams, mais je vais vous dire, c’est de la pure hypocrisie ! Jamais aucun mail privé ou professionnel que j’ai pu lire dans ma vie n’a eu le dixième de la poésie, du dépaysement et du possible-enveloppé d’un spam.
90% des français connectés au web passent leur temps à s’envoyer des conneries de mails en chaîne (cette petite fille mourra de la lèpre si vous ne transférez pas ce mail à 5 pigeons), de photos rigolotes (une voiture pulvérisée accompagnée de sa légende – « encore une blonde qui a fait un créneau ! ») ou de jeux débiles en powerpoint dénigrant d’une manière ou d’une autre les patrons, les femmes, les flics, les belges, les arabes, sarkozy, les juifs ou vous-même si vous ne faites pas partie de ces 6 premières catégories.

Et ces mêmes français font la fine bouche parce qu’ils recoivent ces petites capsules de rêve embarqué, guillerettes et semées de points d’exclamation.
Ce que je préféres dans les spams, c’est la connivence – l’auteur feint de vous connaître et vous fait culpabiliser de l’avoir oublié.

« Hey, salut toi ! C’est Mitch ! Cela fait longtemps que je n’ai pas eu de tes nouvelles. Je viens de tester un nouveau produit qui m’a fait grossir le sexe de 20 centimètres. Incroyable ! Essaye le dès maintenant pour seulement 75$ sur le site xxxxxx.com ! »

La vie ne serait elle pas magnifique si nous n’avions que des copains comme Mitch, ne s’embarrassant pas de dialogues futiles et allant droit au but rien que pour votre bien-être ?

Salut bébé, c’est Lindsay. Désolée pour ce long mutisme mais j’ai changé d’adresse mail. Moi et mon amie Tracy on va sûrement faire les coquines tout l’après-midi dans la chambre. J’ai installé une webcam pour que tu puisses en profiter sur wwxwwww.com !

Cher Henry,Cela fait plusieurs semaines que nous essayons de vous contacter. Votre demande de crédit a été approuvée à 100%. Vous pouvez donc profiter de 400.000$ dès maintenant. Merci de valider vos coordonnées bancaires pour le virement à l’adresse xhxhxhxh.com

Mitch est heureux. Lindsay est enthousiaste et croque la vie à pleines dents. Et je viens d’obtenir quatre cent cinquante mille dollars de crédit sans rien demander.

Les spams sont de petits paquets de fantasmes coulant à flots continus dans ma boite mail. Chacun d’entre eux sont un possible en devenir.

Voilà pourquoi je n’ai jamais activé les filtres [tag]antispam[/tag] – accepter de mettre en route ces machins c’est tout simplement exclure toute possibilité qu’un jour votre vie puisse prendre un tournant considérablement plus enchanteur, par le biais d’une pommade amincissante ou d’un crédit monumental.

Le Génial Césaire

Le Génial Césaire


Aimé [tag]Césaire[/tag] m’impressionne toujours. Certains d’entre vous ne le connaissent pas, l’ayant juste aperçu serrer les paluches des politiciens lors de leurs voyages électoraux aux [tag]Antilles[/tag]. Ne sous-estimez pas ce vieillard sourdingue, c’est un poète majeur, un combattant, un écrivain entré en politique qui aura cristallisé par le biais de son concept de « [tag]négritude[/tag] » tout le malaise du peuple antillais.
François [tag]Fillon[/tag], notre premier ministre, est actuellement en vacances tournée aux Antilles, accompagné de quelques-uns de ses ministres.

De ce protocole coincé et peu chaleureux, je ne retiendrai pas Fillon qui a la bonne idée de parler de lui et de ses petits problèmes (« Il est difficile d’être le 1er adjoint »), mais les phrases prononcées par Césaire, qui sont toujours belles et justes.

« La [tag]Martinique[/tag] est pauvre, petite, angoissée, mais toujours espérante. C’est un modèle réduit du monde actuel.[…]Les petites choses sont embarrassantes, c’est vrai. Mais nous avons une certaine importance. […] Nous sommes le symbole de quelque chose, le symbole de la vieille France, de la vieille politique, de l’espérance et de l’avenir. »

Comprendre : ok en l’avenir, mais ce que nous sommes, nous le sommes aussi devenu grâce et à cause de la France.
Fillon aimerait faire passer le message, les Antillais doivent faire face à leurs responsabilités, la grande vague sarkozy doit aussi atteindre les rivages des [tag]Caraïbes[/tag].
Mais est-ce si simple. Est-il si facile aujourd’hui de professer aux Antilles Françaises les vertus de l’exportation et d’une certaine autonomie de production, après deux siècles de couveuse et d’assistanat infantilisant ? Le débat est trés complexe.

Et j’ai aimé Césaire, vieux chat malicieux, dire à la brochette de ministres devant lui :

Nous comptons sur vous. c’est grâce à vous que nous survivons.

Il n’est pas de son habitude d’être si complaisant avec ses interlocuteurs.
Il faut relire la phrase : notre territoire d’Outremer survit grâce à vous. Notre territoire d'[tag]Outremer[/tag] est en situation de survie, et vous êtes lié à nous.

Amusant face à face avec le premier ministre qui parlait lui-même il y a quelque temps d’un pays en situation de faillite.

Archive Video de la visite de Fillon en Martinique sur TF1 :
http://videos.tf1.fr/video/news/france/0,,3674746,00-francois-fillon-martinique-.html
Aimé Césaire sur wikipedia :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Aim%C3%A9_C%C3%A9saire